L' attaque des Doms (115-119)

  • Le 15/02/2025
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R71

 

 

                              "Indy! Indy!"

                                      Indiana Jones, le Temple maudit

 

 

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     Il y a beaucoup de monde aujourd’hui, sur la place principale de Domopolis et sous la Tour du Pouvoir ! On s’agglutine autour d’un Dom, en présence des médias, qui l’interrogent ! « Oui, répond le Dom, qui n’est autre que le professeur Ratamor, j’ai inventé la cloche qui permet de circuler dans la Chose, sans être affecté par elle !

_ On dirait que vous vous êtes inspiré des anciennes cloches à plongeur…, fait remarquer une journaliste.

_ C’est exact ! Elle est toutefois tout en carbone, pour être plus légère ! Et, comme vous pouvez le voir, elle est équipée d’une visière et elle couvre le corps, jusqu’à la taille, ce qui laisse à l’usager la pleine liberté de se mouvoir !

_ Mais comment fonctionne-t-elle concrètement ? Qu’est-ce qui fait qu’elle protège de la Chose ?

_ Mesdames, messieurs, rien ne vaut l’expérience ! Je vous présente mon assistant Günther ! C’est lui qui, munie de ma cloche, va pénétrer sous vos yeux dans la Chose et en ressortir indemne ! Je vous prie donc de m’accompagner, jusqu’aux abords de la Chose, afin que la science triomphe ! »

La foule se meut, à la suite de Ratamor, portant fièrement sa cloche, et de Günther, qui se cambre devant les dames, en lissant sa moustache ! Évidemment, on filme ces instants, destinés à devenir immortels !

« Nous y voici ! fait Ratamor, alors qu’on atteint les limites de la ville. C’est ici que la Chose nous est la plus proche ! Elle nous envahit pour ainsi dire ! Mais nous avons trouvé le moyen de la rendre inoffensive, avant de la vaincre totalement demain ! Mesdames et messieurs, vous allez être les témoins de l’efficacité de ma cloche… Günther ! »

L’assistant se présente devant Ratamor, qui lui installe la cloche ! On serre quelques sangles, pour maintenir le tout, et le brave Günther, ainsi équipé, se dirige d’un pas lent vers ce rideau si spécial, connu maintenant de tous les Doms ! C’est une sorte de frontière scintillante et émeraude, qui paraît vivante et qui trouble par son éclat !

Günther, sous sa cloche, la tâtonne un peu avec ses bras, puis, enfin il pénètre dans la Chose ! La foule retient son souffle ! Des femmes s’évanouissent ! Des enfants médusés en lâchent leur ballon de baudruche ! Mais la majorité a pris cet air grave, qui signale que l’histoire, avec un grand H, est en marche !

Cependant, Günther a complètement disparu et il faut attendre ! Ratamor consulte son chronomètre, puis informe : « Günther doit rester cinq minutes dans la Chose, ce qui sera amplement suffisant, pour juger la valeur de la Cloche… » Le professeur a à peine terminé que Günther ressort de la Chose ! « Le voilà ! » crie-t-on et Ratamor et d’autres courent vers Günther. On lui enlève la cloche, avec des gestes fébriles et en essayant de se calmer les uns les autres, puis la tête de Günther surgit, souriante, victorieuse ! Des femmes se pâment et un orchestre démarre ! C’est un succès et on porte en triomphe Günther !

« Mais comment avez-vous fait ? demande un journaliste à Ratamor.

_ Eh bien, d’abord, j’ai choisi Günther parce qu’il ne parle que de lui ! Le tout a été de lui donner l’impression qu’il était avec quelqu’un sous la cloche, une amie par exemple ! Celle-ci écoute Günther, semble suspendue à ses lèvres, mais essaie de l’interrompre parfois… ou bien elle le flatte ! En tout cas, Günther continue inlassablement son quasi monologue ! D’ailleurs, la conversation a été enregistrée… Je vais vous la faire écouter ! »

Ratamor démarre l’enregistrement, au milieu du cercle des journalistes, qui tendent une oreille attentive : « Alors, tu comprends, dit Günther, des fois je pars trop tôt, en randonnée, et je ne parviens pas à me réchauffer !

_ C’est comme moi, je… répond l’amie fictive.

_ A cet instant, j’ai quand même un truc…, coupe Günther. Je prends mon café en survêtement… et je mange du pain suédois, tu vois ?

_ Très bien, celui avec des raisins secs…

_ Non, le mien n’a pas de raisins secs… Mais alors, tiens-toi bien, en dessous du pull, il y a… double tricot !

_ C’est pas vrai !

_ Mais si ! Eh, mais qu’est-ce que tu crois ? Derrière, c’est plein d’expérience ! J’ai marché un peu partout ! Les chemins les plus durs, je les ai empruntés !

_ Tu as fait le GR 90, celui qui passe par la Montagne bleue !

_ Non, mais il est moins difficile que celui de la Montagne noire ! Etc, etc. ! »

Ratamor coupe l’enregistrement et dit aux journalistes : « Vous voyez, Günther, à aucun moment, ne s’intéresse à autre chose qu'à lui-même ! La Chose là…, qu’on dit mystérieuse, envoûtante, à cause d’une soi-disant beauté, est absolument sans prises sur lui ! Il reste dans son monde, en l’occurrence ma cloche !

_ C’est le même Dom avant et après !

_ Exactement ! »

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      Après le succès de la cloche, les médias prennent conscience que bien des Doms peuvent traverser la Chose en n’étant point affectés, comme s’ils y étaient totalement insensibles ! Les interviews, les portraits se multiplient ! On découvre un monde insoupçonné, une quasi nouvelle génération, des Doms qui ont tous un truc, pour ignorer la Chose !

Ainsi Schmell ! un grand gars élancé ! un sportif visiblement ! en tout cas, quelqu’un qui se maintient en forme et qui court régulièrement ! Mais laissons-le s’exprimer : « Moi, il m’arrive de faire dix, quinze bornes dans la Chose, sans même la voir ! dit-il. C’est pas mon truc ! » Schmell donne toujours l’impression de « bouger » sur place et il regarde fréquemment sur les côtés ou derrière, ce qui fait penser qu’il est très nerveux !

Il est en tenue de jogging et on se demande s’il en a une autre… « Mais attention, précise-t-il, je vais pas dans la Chose sans biscuits ! J’ suis un semi-pro ! Je sais ce que je fais, je vise la perf. ! Vous voyez ça ? Ma montre connectée ! J’ai tout avec elle ! Ma cardio, ma sudation, ma perte anhydrique, la longueur de ma foulée, bien entendu le nombre de kilomètres, les conseils d’ami : où je dois faire une pause, à quel moment boire, taux de vitamines, etc. Le satellite me suit et ma montre me renseigne ! J’ suis pas tout seul… et j’évolue au fil des diagrammes !

_ De sorte que vous avez le nez sur votre montre et que la Chose, elle, elle ne peut rien contre vous !

_ Voilà ! Elle a beau faire de grands signes, j’ la laisse derrière ! Elle tient pas la route, de toute façon ! Elle a pas le niveau ! » Ici, Schmell renifle, avant de reprendre : « Mais bon, j’ai encore un autre truc ! C’est pas un mystère, tout le monde peut faire pareil ! » Schmell tapote ses deux écouteurs ! « C’est mon monde, man ! Ma musique, mes tubes, sans stops ! J’ suis sur des rails avec ça ! C’est moi, le héros d’ l’histoire ! Le seul gagnant ! Je plane ! La Chose n’est plus qu’un vague décor ! C’est moi qui resplendit ! Le rêve est complet ! C’est magique !

_ On imagine que la musique favorise la perf. !

_ T’as mis « le doigt d’ssus, Jean » ! J’ m’éclate ! Et la Chose, elle ahane, elle souffre ! Elle est dépassée ! C’était bon dans les années 80 ! Mais aujourd’hui, hein ? Qui s’en préoccupe ? »

On remercie Schmell et on passe à Hernoc ! C’est un personnage qui n’a pas l’air commode ! Il regarde les autres, comme s’il était outré de leur présence et qu’on lui devait des comptes ! Il est une sorte de gendarme sur Terre ! Mais Hernoc est en réalité agriculteur et donc face à des difficultés sans bornes ! Il faut se faire tout petit devant Hernoc, car c’est un martyr de la civilisation ! Mais il ne faut pas généraliser, bien entendu : Hernoc représente un type d’agriculteurs et il y en a d’autres, qui ne sont pas comme lui !

Alors Hernoc, comment tu gères la Chose ? « La Chose ? Quelle chose ? demande Hernoc. Moi, j’ m’en fous d’ la Chose ! J’ fais mon boulot, c’est tout ! Si tout le monde faisait le sien, ben, y aurait deux fois moins d’problèmes !

_ D’accord, mais vous travaillez dans la Chose… Vous travaillez même la Chose… et donc vous devez avoir des relations particulières avec elle ?

_ Moi, la Chose, j’en fais ce que j’ veux ! Elle résiste pas à mon tracteur ! C’est d’ la pâte à modeler, la Chose ! J’ la coupe, j’ l’écrase, j’ la pulvérise ! J’ai des quotas à respecter, moi ! Y a un rendement à tenir ! Autrement, comment on nourrit les bêtes ? Vous êtes marrant, vous, les gens d’ la ville ! La Chose, quelle Chose ? Moi, j’ l’emmerde, la Chose ! Snif !

_ Certains disent que vous l’empoisonnez…

_ J’ l’empoisonne pas, j’ la traite ! J’ veux du travail impeccable ! A part mes plants, ça doit être lunaire ! Non, mais vous croyez que j’ai l’ temps de papillonner ? Faut que j’ m’en sorte, oui ou non ?

_ Bien sûr !

_ Voilà ! J’ vais vous dire la Chose, elle est à mon service, point barre ! J’ veux du grand, du complet ! Tout doit être nickel !

_ Vous vous arrêtez jamais ?

_ Pour que vous veniez piquer mes bottes ? Vous rigolez ! Vous n’aurez pas ma ferme ! Faut faire une croix d’ ssus ! J’ suis prêt à prendre le fusil !

_ On dit que la Chose peut apporter la paix ?

_ Et vous mangez d’ la paix ? Pfff !

_ Mais vous n’avez pas l’air heureux…

_ J’ s’rai heureux quand tu t s’ras barré ! Il est où mon chien ? Rex ! Viens, nom de Dieu ! Qu’est-ce tu fous avec les gens d’ la ville ? La Chose ? Mais c’est une carne de toute façon ! »

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      Je te parlerai du génie de la Chose ! comment le moindre fossé, le moindre buisson, le moindre « foutoir » d’arbres, le terrain le plus abandonné, le plus méprisé, le fourré inextricable, ignoré par les Doms, car absolument pas rentable, comment il peut être génial !

Il suffit que la lumière vienne le « fouiller » un peu, surtout la lumière dorée du soir, en hiver ! Les branches nues montrent alors toute leur élégance, leur magie ! Certaines sont humides, avec des bourgeons blancs, et on dirait des fouets de diamants, avec des couleurs roses ! Peux-tu imaginer ça ? Il y a encore des bouquets de lumière, dans des zones d’ombre légèrement mauves, comme si elles étaient un peu glacées !

Le Dom ne voit là qu’un fatras, alors qu’il n’y a pas plus fin, de plus délicat, de plus serti ! L’enfant bat des mains devant le génie, il chante sa gloire ! C’est plus fort que lui, comme l’oiseau gonflé par sa force ! Le Dom, lui est toujours mécontent, méfiant, en colère, plein de projets et de soucis ! Le Dom construit et envahit ! Il ne sait pas voir, ni se reposer, ni aimer, ni s’enchanter ! Et il se croit responsable, adulte !

Il est dans une frénésie sans fin et il dévore sa planète ! Les maisons et le béton écrasent les pierreries, les fêtes de la lumière, les dialogues entre les buissons, leur enlacements intimes, leur lutte à mort aussi ! Le béton, c’est les problèmes des Doms, qui ne savent pas vivre en paix ! C’est la laideur en marche ! Ce n’est pas au génie de la Chose de disparaître ou de changer, c’est au Dom d’ouvrir les yeux, ne serait-ce que parce qu’il n’est pas heureux, qu’il est violent et dans une impasse !

Le génie de la chose est gratuit ! Chacun peut en profiter ! Il est dans un brin d’herbe et même dans une flaque entourée de boue ! Le génie de la Chose apporte la sécurité et la joie, l’espérance ! Nul ne peut le voir, s’il est concentré sur lui-même et son égoïsme ! Nul Dom ne peut le comprendre et s’en régaler ! Les fêtes de la lumière sont ineffables ! L’infini est dans le fossé, dans la moindre parcelle de la Chose ! L’enfant s’en illumine, en découvrant tous ces trésors ! Il est subjugué ! Le monde des Doms lui paraît loin… et si prévisible, et si chaotique et si malheureux, car les Doms écrasent les Doms ! Et si envahissant ! Et si bête aussi ! Les merveilles sont là et les Doms s’en moquent ! Eh ! Ils ont de sacrés problèmes ! Ont-ils faim ? Sont-ils malades ? Non, ils ont une sorte de damnation qui pèse sur leurs épaules ! Ils ont le visage fermé par la souffrance ! Quel est leur problème ? Mystère ! A moins que ce ne soit la soif de leur ego ?

Le Dom traîne sa misère et méprise la Chose, comme s’il la connaissait ! Le Dom est parfaitement ignorant au sujet de la Chose ! Par contre, la Chose, elle, connaît par cœur le Dom ! L’enfant, qui a de l’expérience, lit à travers le Dom, comme par une fenêtre ! L’enfant rit parfois du Dom, ce lourd prisonnier sans prison ! Le Dom détruit, la Chose rayonne ! Le Dom prend, la Chose donne ! Le Dom grimace, la Chose sourit ! Heureux l’enfant qui voit la merveille qu’est la Chose, le monde des Doms, à jamais, n’est plus le sien !

Je te parlerai de la beauté ineffable, infinie ! Heureux celui qui la voit, car il est sauvé ! Son cœur est celui de l’enfant qui admire ! Ses yeux voient ! Il est dans le monde de Dieu ! Il rayonne dans la Chose ! Il est enfant de la création, il est enfant de Dieu ! Il sait des secrets ! que tout est magie, enchantement, génie et rêves ! Il n’est plus en face du vide des Doms ! La femme est belle, mais heureux celui qui se réjouit de la lumière !

Je te parlerai de la beauté inouïe, géniale et infinie, mais les mots sont faibles ! Les mots sont les mots ! Il faut travailler avec eux et la pensée, mais la beauté pénètre l’enfant comme un rayon ! Je te parlerai aussi du monde des Doms et de sa laideur, car il naît de la peur, de la fermeture et de l’ignorance ! Il est obscurci par la lâcheté et l’égoïsme, qui est de la peur ! Je te parlerai des fausses fêtes des Doms, de leurs coups de dents sous les sourires, de leur folie !

Le monde des Doms attaque la beauté et la détruit ! Ainsi, il se condamne à la nuit ! à la mort et aux larmes ! Le monde des Doms n’a pas d’issue ! Plus il dévore la beauté et plus il devient malade et ignorant ! N’écoute pas le Dom ! Il se croit sérieux et il ne l’est pas ! C’est un enfant perdu ! Il croit savoir et il ne sait pas !

Va dans la Chose ! Elle t’expliquera ! Tu l’écouteras et elle te racontera ! Elle te dira combien elle t’aime ! Et ton cœur sera gonflé ! Tu chanteras alors la beauté, car tu seras sauvé ! Tu auras pitié du Dom, mais le chemin est long, car le Dom est dur ! Tu seras consolé et tu chanteras la gloire de la beauté et la puissance de Dieu, qui est ineffable, infini et qui t’aime tant !

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      « Combien tu vends ton pays ? Hein ? Dis ton prix ! Je veux acheter ton pays ! Je le veux, c’est tout ! Ce serait génial, si tu vendais ton pays ! Pourquoi tu ne veux pas le vendre ? Je le veux ! Allez, donne-moi un prix ! On peut s’arranger ! Si tu ne veux pas, je vais te faire des crasses ! Je peux te faire des crasses, comme tu peux même pas imaginer ! Hein ? Alors, tu le vends ton pays ? Allez ! Tout est à vendre de toute façon ! Tout a un prix ! C’est moi qui commande et je veux acheter ton pays ! C’est pas plus compliqué que ça ! »

« Pourquoi j’aiderais les autres ? Si j’aide, faut me donner aussi ! C’est le deal ! Ce que je supporte pas, c’est qu’on profite de moi ! Il y a des gens qui pleurent et qui sont pauvres, ils n’ont qu’à travailler ! Si on veut, on peut ! Y en a marre d’assister ! Moi, je dépends de personne ! Je me suis fait tout seul ! Et il y a les chiffres ! On est en déficit et on ne peut plus donner ! Cela fait des années qu’on nous prend pour des poires et on donne, on donne ! Ça suffit ! On ferme le robinet ! J’ comprends pas pourquoi il faudrait aider les autres, ça me dépasse ! »

« J’ vais montrer au monde ce qu’est d’être efficace ! Je vais me débarrasser de tous les parasites ! Les faibles aux oubliettes ! Seuls survivront les plus forts ! Moi et quelques autres ! On a déjà trop aidé les faibles ! Allez, ouste dehors ! Je suis arrivé en haut, parce que je suis fort, alors pourquoi pas eux ? Je n’ai plus peur depuis que je commande ! On guérit de sa peur par la puissance, en faisant le monde à son image, en le contrôlant ! Que le plus faible soit écrasé, qu’est-ce que ça peut faire ? »

« Mon ego partout et toujours ! Il faut qu’on parle de moi encore et encore ! Je suis le centre de tout, l’intérêt de tous ! Tout le monde est suspendu à mes lèvres, à mes décisions ! Seul moi existe, comme Dieu ! Je dirige le monde ! Je dis à celui-ci : « Va ! » et il va ! Je dis à cet autre : « Arrête ! » et il arrête ! Alors pourquoi ne veux-tu pas me vendre ton pays ! Parce que tu as une âme ? Ah ! Ah ! Qu’est-ce que c’est ? Tout se vend et tout s’achète ! Je ne comprends ni la culture, ni l’histoire ! Cela ne m’intéresse pas ! Seul je compte et si tu veux mon aide, il va falloir payer ! »

Ainsi parle le vent… et le Dom ! Ainsi va la poussière… et le vide ! Ainsi est la superficialité, qui a aussi son rôle ! Ainsi est rendue ridicule la guerre, par l’argent et le commerce ! Tuer est ringard, puisque tout est disponible sur le Net ! Pourquoi envahir, quand on peut acheter ? Ainsi la bêtise et la cupidité servent la sagesse, ce vieux diamant, caché dans la terre ! Ainsi évoluent les Doms malgré eux ! Ainsi la planète est plus petite, à cause de la soif de puissance ! Ainsi on se regarde dans les yeux, parce que l’ego est énorme ! Ainsi le mensonge paraît anodin, tant l’ego submerge ! Ainsi le secret paraît dépassé, puisque l’ego rayonne ! Ainsi la paix avance malgré tout, puisque les armes sont vieilles, par rapport à l’argent !

Mais la sagesse, ce n’est pas l’ego bien entendu ! L’ego écrase et ne résout rien ! L’ego gonfle comme un ballon et s’en va, de sorte qu’on l’oublie ! L’ego, c’est du bruit, tandis que la sagesse est silencieuse ! Ainsi est la Chose ! Elle ne dit rien apparemment ! Elle paraît vide, inerte, avec son train-train : les oiseaux chantent, le ruisseau coule et les fleurs fleurissent ! A quoi bon ? L’ego hausse les épaules ! Il a mieux à faire ! Il dirige le monde ! Et il fait des déclarations et il signe des décrets et il s’use, se vide et s’en va !

La Chose parle pourtant… Elle crée ce vieux diamant, caché dans la terre, appelé Sagesse ! Celle-ci est très curieuse… Elle est là où on ne l’espérait pas ! On est surpris de la trouver, chez un Dom ou un autre ! Elle est comme un vieux soldat debout, à cause d’une alchimie assez mystérieuse ! Car la sagesse est un désir de vérité, de paix ! On sent qu’elle est nécessaire pour évoluer, au contraire du mensonge, qui ne permet rien de durable ! La sagesse repousse comme la mauvaise herbe…, malgré la puissance, le pouvoir, le bruit de l’ego ! C’est comme un petit ruisseau, qui ne tarit pas, et que chacun connaît plus ou moins, où on peut toujours boire, qui n’est jamais vraiment inconnu ! qui repose, qui donne de l’espoir, qui fait qu’on se tient soi-même sur ses jambes, qui offre de la dignité !

Heureux celui qui aime la sagesse, qui a ce diamant dans le cœur ! C’est le don de la Chose, pour l’enfant qui l’aime, c’est son trésor, pour son amoureux ou amoureuse ! C’est le diamant de la beauté ! son cadeau ! L’enfant va sur le chemin, libre et léger, sous les yeux doux de la beauté ! Il chante la sagesse, car il est en elle ! Il est comme l’oiseau, mais sans ses inquiétudes et sa domination ! Il peut même apaiser l’oiseau ! L’enfant rit plein de sagesse ! C’est le cadeau de la beauté ! Alors que l’ego écrase le monde des Doms, tant il est stupide !

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      Dieu rit dans l’enfant sage ! Dieu montre à l’enfant sage son génie et l’enfant sage s’en émerveille ! Car ce génie est fait d’amour ! L’infini est fait d’amour ! Heureux celui qui voit le génie de Dieu ! Il a le cœur de l’enfant, sa confiance, sa candeur !

Dieu n’est pas avare, il est infini ! Peut-on se représenter une beauté infinie ? L’art ne saisit qu’une infime partie de cette beauté, une minuscule partie, une partie même dérisoire et qui pourtant témoigne de cet infini et qui pourtant fait que l’artiste s’enchante de son travail : il n’est pas en effet Dieu et il ne possède pas la lumière du soleil ! Il a un média, l’écriture, la peinture, la musique, etc. et c’est déjà magnifique, mais ce n’est pas la lumière, ni l’amour ! C’est moins souple, moins puissant, mais l’artiste n’est qu’un homme et il doit le comprendre !

Il est des artiste qui ne sont pas des enfants et qui ne s’enchantent pas du monde ! Ils peuvent être des artistes de très grandes valeurs, sans louer Dieu ! Pourquoi pas ? L’amour n’est pas une loi ! Mais Dieu rit dans l’enfant sage ! Il lui montre tous ses trésors, tout son génie et Dieu et l’enfant sage se réjouissent ! Celui qui voit le génie de Dieu ressent un bonheur ineffable ! Son cœur s’envole et se met à chanter !

Alors pourquoi tant de Doms et tant de souffrances ? A cause de la peur essentiellement ! L’égoïsme au fond n’est rien d’autre que de la peur ! On méprise par crainte ! On se ferme par peur ! On se barricade et on frappe pour la même raison ! On triomphe même, pour faire taire absolument la peur, comme si on pouvait s’asseoir dessus, avant qu’elle ne disparaisse ! Ainsi le Dom reste Dom, par peur ! En cela il est condamnable ! Car on lui demande seulement un peu de courage, ne serait-ce que pour son bien ! La haine empêche ce petit regard de côté, ce petit effort de jugement ! Elle aveugle et entraîne au pire !

Paschic souffre toujours, de toutes ces années de stress et de chagrins, à cause de la Machine ! Ce qui est terrorisant, c’est de ne voir nulle part une main amie, de se sentir toujours un étranger, d’être rongé par l’incompréhension ! Alors, le simple fait de tenir debout est une épreuve ! L’injustice aussi détruit, mais comment raisonner des Doms qui ont peur ? Paschic souffre depuis des années de digestions difficiles ! La peur a rendu son intestin hypersensible ! Cela peut paraître anodin, mais ce sont des insomnies, des fatigues sans fin, de la dépression, des douleurs insondables ! Ainsi Paschic est aussi la victime de la peur des Doms et il pourrait dire qu’il n’y a pas de Dieu, puisqu’il souffre, que son chagrin lui aussi est infini !

Ainsi l’hiver est difficile ! Car l’effort physique, le fait de se sentir en forme et d’être capable de lutter, donnent le sentiment d’avancer, rassurent ! Mais l’hiver enferme, cloître et inquiète ! Beaucoup de Doms vont à la catastrophe, par angoisse et impatience ! Ils se blessent, sont victimes d’un accident ou mettent le feu à leur logement ! C’est la catastrophe de l’hiver ! C’est la peur qui ne trouve pas de remèdes ! Car l’hiver dépouille et oblige à faire les comptes ! Qu’est-ce qui nous tient, nous ancre, nous console ? Quel est notre repère ?

Au-delà de ses souffrances, Paschic garde les yeux sur son trésor ! C’est sa foi, sa confiance, qui le fait résistant à la peur, qui lui conserve sa paix ! Ainsi il ne chavire pas dans la haine, le ressentiment ! Car Paschic pourrait en vouloir aux Doms, aveugles et qui piétinent et qui détruisent ! Mais il garde sa force et reste lucide, compréhensif !

A priori, la force semble la domination et le monde aujourd’hui en est la surenchère ! C’est à qui dominera l’autre ! Mais la domination ne guérit pas la peur et c’est pourquoi elle est sans fin et destructrice ! Le Dom a toujours besoin de dominer, pour échapper à sa peur et même la nier ! C’est dire s’il fait des victimes ! Car beaucoup sont méprisés et jugés inférieurs, pour satisfaire le Dom et qu’il sente son pouvoir !

Au contraire, l’enfant sage ou de lumière n’a pas besoin de dominer ! Il se rappelle les merveilles de la Chose et de l’enseignement de la beauté ! C’est la foi, la véritable force ! C’est elle le remède à la peur, mais dès que la foi conduit à la haine, alors elle n’est plus la foi ! Aucune haine dans la foi !

Le Dom se moque de l’enfant de lumière, qui s’enchante de la beauté ! Cela lui paraît puéril et naïf et comment pourrait-il en être autrement ! C’est encore la peur qui produit le mépris du Dom ! L’enfant de lumière ne peut espérer la justice, car il ne peut pas guérir la peur du Dom comme ça, d’un coup de baguette magique ! C’est au Dom de s’apaiser, de guérir lui-même ! L’enfant de lumière doit accepter d’être incompris, mais que lui importe puisqu’il est compris et aimé de Dieu ! N’est-ce pas suffisant, n’est-ce pas là son immense chance ?

Et au printemps, il rira avec Dieu de la fête de la Chose, de ses splendeurs infinies, car ils s’aiment tous les deux et se comprennent !

 
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