De crier la bouche pleine
- Le 11/05/2018
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Le 8 mai, nous fêtons la fin de la seconde guerre mondiale, dans laquelle la France n'a pas brillé! Par peur, elle a d'abord baissé son pantalon jusqu'aux chevilles (le gouvernement anglais aussi): inertie face à l'occupation de la Rhénanie et à l'Anschluss, abandon de la Tchécoslovaquie et soutien frileux à la Pologne!
Avoir peur est bien compréhensible, mais l'une des grandes leçons de 40, c'est qu'il ne sert à rien de reculer devant les voyous... Au contraire, ils prennent de l'assurance et tôt ou tard il faudra les affronter! Les pays ne réagissent pas mieux que les individus quand ils sont menacés et c'est toujours le courage qui est en question...
Pendant des années, avant la guerre, la classe politique s'est déchaînée: c'était à qui parlerait le mieux d'honneur, de justice, d'égalité, etc., mais le véritable ennemi se présentant, la République s'est "dégonflée", comme un soufflet au fromage! Il n'est plus resté au fond du plat que le désir de se protéger, derrière un vieillard, avec hypocrisie pour ne pas avoir trop honte!
Les moutons se sont pressés autour du berger, par peur du loup! Aujourd'hui, la France peut être fier du général de Gaulle, qui symbolise la résistance, mais l'appel du 18 juin a été lancé dans la plus parfaite indifférence! Les Français qui ont rejoint le général (ou la dissidence) peuvent se compter sur les doigts d'une main; de Gaulle lui-même sera condamné à mort par Vichy!
A Londres, il était quasiment tout seul et il a dû bien en souffrir! Pendant ce temps-là, la Marine française se sabordait à Toulon et produisait un incroyable gâchis, parce qu'elle se sentait le devoir d'obéir au gouvernement, même si celui-ci était lâche et reluquait de plus en plus l'idéal nazi! La discipline ne saurait expliquer complètement un tel aveuglement!
Mais les hommes se trompent volontiers sur eux-mêmes! Pétain disait qu'il ne voulait pas abandonner les Français, qu'il jouait pour eux le rôle de paratonnerre auprès des Allemands! Il avait déjà oublié comment l'avait séduit de pouvoir être enfin en pleine lumière, lui qui avait vécu dans l'ombre de Joffre! En traitant avec les Allemands, il devenait l'homme le plus important du pays!
Et les marins ont eu peur de la révolte, parce qu'elle est toujours plus dérangeante! Ils ont préféré regagner leurs pénates, sous le couvert de l'obéissance! Eux aussi ont rejoint la bergerie! Ils y mettaient leur honneur, comme si avoir du caractère avait été le pire des crimes! Car c'est bien le caractère, le courage et donc le choix qui font la valeur de nos vies; même si les commémorations du 8 mai auront, comme d'habitude, tendance à faire croire, que nous avons tous été à la "hauteur", des résistants!
Notre conduite pendant la guerre devrait nous être pleine d'enseignements, mais au fond il n'en est rien! Nous sommes toujours aussi aveugles et hypocrites, et les "général de Gaulle" sont toujours aussi seuls et ignorés! Et ce sont toujours les mêmes qui crient et qui occupent le devant de la scène, les mêmes qui disparaîtront quand le loup remontrera ses dents! Il n'y a pratiquement aucune évolution et c'est ce que je m'en vais prouver!
Mais d'abord ceci: en France, nous avons tout! Il y en a bien qui ont faim et qui n'ont pas de toit, mais ils sont justement l'exception qui confirme la règle! Nous avons tout! Et si nous avons la sensation qu'il nous manque quelque chose, ce n'est certainement pas du nécessaire!
Pour ma part, j'ai toujours vécu avec moins de mille euros par mois et même avec le temps j'ai constaté que j'en avais toujours trop! J'achète des choses qui certes me font plaisir, mais qui ne me sont pas indispensables! Je vis dans le luxe, pour ainsi dire, et c'est aussi le cas de presque tout le monde! Mais comment suis-je arrivé à me contenter de si peu, ce qui me permet d'être lucide?
Toutes nos inquiétudes et nos agacements viennent de notre amour-propre et ceux qui manifestent le font parce qu'ils se sentent "grugés", dévalorisés; non parce qu'on leur "enlève le pain de la bouche"! C'est notre volonté de puissance, notre désir de dominer qui crée chez nous le besoin et donc aussi l'insatisfaction! Voilà pourquoi nous sommes mécontents, nous nous sentons frustrés!
Celui qui est en paix avec lui-même, qui ne veut plus dépasser les autres, celui-là ne comprend plus pourquoi on en voudrait toujours davantage et il en bien assez! Au-delà du nécessaire, c'est la parade qui commence... et là évidemment, il n'y a pas de limites: pour épater, rien n'est trop beau!
Si l'emploi est directement menacé, s'il y a vraiment un risque de se retrouver sans moyens de subsistance, alors oui il faut se défendre et combattre! Mais combien de fois cela est-il le cas? Il y a des syndicats qui appellent à manifester, parce qu'il faut qu'ils montrent qu'ils sont encore présents... ou parce qu'ils ressentent une sorte de malaise... Leurs raisons sont indéfinissables, quand on discute avec eux... et pour cause! Est-il en effet possible de satisfaire son égoïsme? Nous avons vu qu'il ne guérissait pas nos inquiétudes, et donc la réponse est claire!
Mais au lieu de regarder en soi, de se demander au plus profond qu'est-ce que l'on veut, qu'est ce qui nous rendrait heureux; ce qui demande du temps, de la patience et de la retenue; il est évidemment plus facile de croire qu'un tiers est responsable de nos maux; ce qui est sans fin, puisque la racine du mal est aussi en nous! Mais même quand l'ennemi est bien là et bien redoutable et bien réel, on ne se mobilise pas forcément... Au contraire, notre révolte, qui ne venait que d'un confort irritable à cause de notre avidité, se change soudain en terreur et en compromis! Le courage et la satiété, c'est comme l'électricité avec l'eau!
Nous préférons donc nous rappeler mai 68 plutôt que l'armistice de 40, car évoquer le "printemps de la liberté", c'est encore nous "caresser dans le sens du poil", c'est encore un moyen de nous "choyer", de nous voir sous un jour qui nous convient, puisqu'il redonne de l'importance à nos plaisirs: pauvres victimes que nous sommes de tous les interdits! L'Eglise et la morale ne nous ont-ils pas assez accablés? Tout était possible! Nous allions pouvoir courir nus dans les champs! Mais, snif, le monde réel a de nouveau mis sur nous sa main de fer... et nos rêves de nouveau s'en sont allés... Quelle complaisance absurde et de "gosses de riches"!
J'ai lu ici et là: "Mai 68, c'est là que tout a commencé..." Ah bon? L'histoire de l'homme, qui n'est que la conquête de sa liberté, ce qui correspond au développement de sa conscience, a commencé en mai 68? La révolution française ou le Front populaire, (pour ne citer qu'eux et la liste est vertigineuse!), n'étaient-ils pas des coups de boutoirs? On est confondu par tant de bêtises, mais peut-être que pour beaucoup le monde n'existait pas avant la société de consommation! En tout cas, cela montre qu'on n'a aucune vision large, ni profonde, de ce que nous sommes, du sens que nous suivons!
N'est-il pas préférable de penser que nous apprenons plus de nous-mêmes dans nos échecs que dans nos succès? Lindbergh, qui est un personnage controversé, notamment parce qu'il était polygame, méprisait en secret la France et l'Angleterre, au point de créer aux Etats-Unis le mouvement isolationniste: America first. Mais pour bien comprendre le pilote vainqueur de l'Atlantique, il faut se reporter à l'éducation de ses fils... Il leur apprend volontiers à nager, mais en surveillant de très près leur psychologie... Le cadet, encore maladroit, plonge sans avertissement d'un petit phare, pour rejoindre la côte, et Lindbergh le laisse faire, car, dit-il, son fils a pris une décision, il s'est "engagé" et il doit donc assumer jusqu'au bout son choix, sans compter sur l'assistance de son père (quoique celui-ci se tienne tout même prêt à intervenir...)!
Cette façon de penser explique les sentiments de Lindbergh à notre endroit: nous nous "lançons" dans la guerre en quarante, alors que nous ne sommes pas en mesure, au fond, de la gagner (comme en 14!); alors que tôt ou tard nous appellerons au secours les Etats-Unis (ce que fera le gouvernement français, avant de signer l'armistice!) et que pire nous nous montrerons, en cas de victoire, aussi impitoyables que nous l'avons été au Traité de Versailles! La sympathie de Lindbergh va plutôt aux Allemands, car au moins ils sont "logiques" avec eux-mêmes; ils sont indépendants et forts!
Les principes stricts de Lindbergh font non seulement sa droiture, mais aussi ses limites... Il ne voit pas que même faibles la France et l'Angleterre luttent pour la liberté et la démocratie, tout comme Roosevelt, avec lequel le pilote sera en conflit... Mais si j'évoque son avis, c'est pour montrer combien la lutte est présente dans notre quotidien et comment elle peut être viscérale, importante, loin des égoïsmes de surface, qui n'en ont jamais assez!
En 40, il nous manquait un véritable chef, capable de prendre fermement des décisions! Il y avait le général de Gaulle, mais au moment des faits, il est sans pouvoir, et il doit s'exiler! Les autres, ceux qui auraient pu et dû nous sauver, vont se "partager le gâteau" (même si bien entendu nul n'est tout noir, ni tout blanc!)
Aujourd'hui, nous avons un véritable leader, c'est Macron. Oh! bien sûr, il va se tromper et il a parfois des propos si vifs qu'il provoque des haines terribles et qu'il dit des choses qui ne sont pas justes! Mais il est jeune et il a un idéal et il devrait essayer de l'atteindre sans faillir! (Puissé-je ne pas regretter ces paroles...)
Cependant, il a en face de lui cette France quasi éternelle et qui n'est capable que d'un seul exploit: celui de crier la bouche pleine (ce qui est tout de même déconseillé aux enfants...)! Cette France-là est usante, ingrate et elle demandera à Macron une patience à toute épreuve!
Pour ma part et aussi loin que remontent mes souvenirs, j'ai toujours été devant un monde que je ne comprenais pas, dont j'ignorais les règles, et il n'y a pas d'explications à cela. Certes, j'ai mon orgueil et mon égoïsme, mais je n'ai jamais voulu supplanter qui que ce soit et on a pris ma douceur pour de la faiblesse! On m'a piétiné durement et même avec une sorte de hargne, de sorte que je fus fragilisé et prêt à me détruire, ce que je fis jusqu'à mes quarante ans et j'en subis encore les conséquences!
Il m'a fallu attendre la cinquantaine pour que les choses se décantent pleinement, au point que j'ai à présent une idée claire sur le comportement des gens, ce qui me permet de m'apaiser en prenant conscience de ma valeur. Aujourd'hui, je ne cesse de voir comme ma pensée est étendue et juste et même originale et je ne doute pas qu'un jour elle finisse par se faire connaître et être diffusée; car elle est simple et vraie, comme son auteur! En tout cas, il est pour moi certain qu'elle pourrait en aider beaucoup...
Pourtant, mon isolement est tel que régulièrement je me demande si je ne suis pas carrément dérangé ou si je ne devrais pas plutôt planter des choux! Mais le plus souvent ma question est celle-ci: comment est-ce possible qu'il y ait si peu de gens pour se secouer et aller vers le bien?
La situation de la France en quarante nous renseigne à ce sujet... Comment toute une nation peut-elle accepter la défaite? Comment peut-elle toute entière se ranger derrière l'armistice, qui la fait collaborer avec son ennemi? Sur qui compte-t-elle pour se sauver et être libérée, pour reprendre une question de Lindbergh? Et comment expliquer que de Gaulle soit, dans sa solitude, si lucide et si déterminé (comme si les autres étaient fous en somme!)?
Quand je considère cette période, je me dis que moi aussi je suis en dissidence, que moi aussi je suis un résistant! A côté, il me semble que Vichy continue, mais sur une autre musique!
En mai 68, la jeunesse a envie de tourner la page; elle ne veut plus du "vieux général", et c'est naturel: notre évolution continue! Mais le "loup" est toujours là et il faut savoir le regarder en face! La violence, qui n'est rien d'autre que le triomphe de l'égoïsme, la suprématie de la bête, pointe son nez tous les jours!
Cependant, terminons tout de même par une bonne nouvelle: dans un communiqué, la Marine française affirme avoir tranché! Après plus d'un demi-siècle de réflexions, elle convient que le véritable ennemi, lors de la deuxième guerre mondiale, était bien l'Allemagne et non l'Angleterre!
Voilà une nouvelle qui ravira les fans de la Marine et les autres, tant il est vrai qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire! Et nul doute que les marins n'hésiteront plus désormais à jouer au foot (jeu anglais!), puisqu'ils savent dans quel but tirer! Hip! Hip! Hourra!
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